DROIT INFORMATIQUE

Jurisprudence

CA Angers, 18 septembre 2012
RG 11-00725

droit informatique

Les grands arrêts de la jurisprudence en droit informatique : arrêt de la Cour d'appel d'Angers, du 18 septembre 2012 (RG 11-00725)

Cour d'appel d'Angers
18 septembre 2012, RG 11-00725

COUR D'APPEL
D'ANGERS
Chambre Sociale


Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 00725.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 14 Février 2011, enregistrée sous le no 09/ 00555


ARRÊT DU 18 Septembre 2012


APPELANTE :

SARL CJ. COM
22 rue de Constantine
72000 LE MANS

représentée par Maître Philippe GRUNBERG, avocat au barreau du MANS


INTIME :

Monsieur Michel X...
...
72000 LE MANS

représenté par Maître Thomas LECLERC, substituant Maître Jérôme DUPRE (SELARL), avocat au barreau de NANTERRE (No du dossier 002044)


COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Avril 2012 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président
Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller
Madame Anne DUFAU, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier

ARRÊT :
prononcé le 18 Septembre 2012, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


FAITS ET PROCÉDURE

M. Michel X... a été engagé le 1er juin 2001 par la société CJ Com, qui crée des sites Internet.

Un contrat de travail écrit, à durée indéterminée, a été régularisé entre les parties le 1er septembre 2008, y étant stipulé, outre l'ancienneté de M. X..., que celui-ci occupait la fonction d'intégrateur, webmaster, au coefficient 2. 4 de la convention collective nationale de la publicité, pour une durée de 169 heures par mois, contre une rémunération brute mensuelle de 2 822, 31 euros, et qu'il était l'objet d'une clause de non-concurrence.

Par lettre remise en main propre contre décharge le 10 mars 2009, la société CJ Com a fait savoir à M. X... que, " compte tenu des difficultés économiques et financières rencontrées ", elle était " dans l'obligation de réduire ses charges d'exploitation ", et qu'" afin de sauvegarder la compétitivité de la société, mais aussi nous permettre de répondre, avec la même réactivité, à nos clients et aux compétitions auxquels nous répondons, il a été convenu d'un commun accord que les heures supplémentaires, de la 36ème heure à la 39ème heure jusqu'alors payées, seront dorénavant placées sur un compte temps pour être récupérées en fonction de la charge de travail de l'entreprise ", la mesure entrant en application le 16 mars suivant.

Par avenant du 29 juin 2009, à effet au 1er juillet suivant, la durée du temps de travail de M. X... a été réduite de 39 heures à 28 heures hebdomadaires, sa rémunération brute mensuelle étant désormais de 1 957, 61 euros.

Suivant courrier remis en main propre contre décharge le 18 février 2008, M. X... a été l'objet d'un avertissement de la part de la société CJ Com, auquel il a apporté une réponse écrite le lendemain.

Il a été convoqué à un entretien préalable en vue d'un licenciement par lettre recommandée avec accusé de réception du 30 juillet 2009.
L'entretien préalable s'est tenu le 10 août 2009.
Il a été licencié, pour faute grave, par courrier recommandé avec accusé de réception du 13 août 2009.

Il a saisi le conseil de prud'hommes du Mans le 16 septembre 2009 aux fins que, son licenciement étant jugé sans cause réelle et sérieuse, la société CJ Com, outre qu'elle supporte les dépens, soit condamnée à lui verser, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
o 3 951, 34 euros d'indemnité compensatrice de préavis ainsi que 395, 13 euros de congés payés afférents,
o 4 198, 30 euros d'indemnité de licenciement,
o 1 580, 53 euros au titre de la contrepartie de la clause de non-concurrence,
o 30 000 euros de dommages et intérêts,
o 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 14 février 2011, auquel il est renvoyé pour l'exposé des motifs, le conseil de prud'hommes a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire prévue à l'article 515 du code de procédure civile :
- dit que le licenciement de M. X... ne relevait pas d'une faute grave mais d'une cause réelle et sérieuse,
- condamné, en conséquence, la société CJ Com à lui verser
o 3 951, 34 euros d'indemnité compensatrice de préavis ainsi que 395, 13 euros de congés payés afférents,
o 4 198, 30 euros d'indemnité de licenciement,

o 1 580, 53 euros en contrepartie de la clause de non-concurrence,
o 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté M. X... du surplus de ses demandes,
- débouté la société CJ Com de sa demande du chef de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que les créances salariales de M. X... produiront intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la société CJ Com de la convocation devant le bureau de conciliation, soit le 21 septembre 2009, et que les créances indemnitaires produiront intérêts au même taux à compter de la date de notification du présent,
- condamné la société CJ Com aux entiers dépens.

Cette décision a été notifiée à M. X... le 17 février 2011 et à la société CJ Com le 16 février 2011.
Cette dernière en a formé régulièrement appel, par lettre recommandée avec accusé de réception postée le 11 mars 2011.


PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions déposées le 25 avril 2012 reprises oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé,
la société CJ Com sollicite l'infirmation du jugement déféré, qu'il soit dit et jugé que le licenciement de M. Michel X... repose bien sur une faute grave, que celui-ci soit condamné à lui restituer la somme de 9 044, 77 euros qu'elle lui a réglée, ainsi qu'à lui verser 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre qu'il supporte les entiers dépens.

Elle fait valoir que le licenciement pour faute grave de M. X... était parfaitement fondé pour les motifs énoncés dans la lettre de licenciement et que, ses comportements antérieurs, avérés, et qui ont d'ailleurs donné lieu à sanction pour certains, constituent bien plus des circonstances en faveur de la qualification retenue, que des excuses ainsi qu'a pu en juger le conseil de prud'hommes. De même, elle indique que les premiers juges ne pouvaient écarter la lettre du CODEL, certes postérieure à la date de l'entretien préalable, les faits que celle-ci relate étant toutefois visés à l'appui du licenciement.
Elle demande qu'il soit noté que la réduction de son temps de travail a été faite à la demande expresse de M. X....
Subsidiairement, elle fait observer que le fait que M. X... souffre d'une maladie infectieuse est totalement étranger à l'objet des débats et, que si M. X... relève appel incident des sommes qui lui ont été allouées, il ne dit rien de sa situation actuelle ; elle indique, au surplus, que la base des condamnations est celle d'un temps partiel et non d'un temps plein.

Par conclusions déposées le 19 avril 2012 reprises oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé, M. Michel X... sollicite la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a considéré que son licenciement ne reposait pas sur une faute grave, de même qu'il lui a reconnu le bénéfice de l'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés sur préavis, de l'indemnité de licenciement, de la contrepartie de la clause de non-concurrence, tout comme il a condamné la société CJ Com à lui verser 500 euros d'indemnité de procédure et à prendre en charge les dépens.
En revanche, formant appel incident, il demande l'infirmation du même du fait qu'il a jugé que son licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts de ce chef, ainsi que sur le quantum des sommes accordées au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés sur préavis, de l'indemnité de licenciement et de la contrepartie de la clause de non-concurrence.

Dès lors, le licenciement étant jugé sans cause réelle et sérieuse, il sollicite que la société CJ Com soit condamnée à lui verser :
o 7 388, 66 euros d'indemnité conventionnelle de licenciement,
o 5 457, 20 euros d'indemnité compensatrice de préavis et 545, 72 euros de congés payés afférents,
o 2 738, 64 euros au titre de la contrepartie de la clause de non-concurrence,
o 49 114, 80 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Il forme par ailleurs des demandes nouvelles, en ce qu'il réclame que la société CJ Com soit condamnée à lui verser :
o 16 371, 60 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral,
o 569, 70 euros de rappel de salaire,
o 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Enfin, il sollicite que les " condamnations des intérêts au taux légal soient augmentées ", que soit prononcée la capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du code civil, que l'exécution provisoire soit ordonnée et que la société CJ Com soit condamnée aux entiers dépens.

Il réplique que :
- la véritable cause de son licenciement ne réside pas dans la faute grave qui lui est reprochée, mais dans les difficultés économiques auxquelles était confrontée la société CJ Com depuis 2007 et, qui ont conduit, successivement, à ce que ses heures supplémentaires ne soient plus rémunérées et son temps de travail réduit, bien que sa charge de travail soit restée identique, modifications qu'il avait acceptées dans l'espoir de conserver son emploi,
- les incidents qui lui sont imputés pour le licencier sont fallacieux ; parler d'un comportement inadmissible de sa part, et persistant, n'est pas conforme à la réalité du dossier, où un seul avertissement lui a été infligé le 18 février 2008 auquel il a répondu aussitôt, suivi, de plus, de la régularisation de son contrat de travail le 1er septembre 2008 ; il en est de même de la perte du client CODEL, étant à préciser préalablement qu'il n'est aucunement établi que la société CJ Com ait eu connaissance du courrier du dit client lors de l'entretien préalable,
- s'il forme appel incident au quantum des sommes qui lui ont été octroyées, c'est que la moyenne brute mensuelle de salaire qui a été retenue par le conseil de prud'hommes est erronée,
- il démontre les préjudices subis, y compris le préjudice moral distinct de celui créé par la perte de son emploi,
- si en mars 2009, il a accepté que les heures supplémentaires jusqu'alors payées soient désormais versées sur un " compte temps ", celui-ci n'ayant jamais été créé, il est en droit de réclamer le rappel des heures supplémentaires accomplies jusqu'en juillet 2009.

****

À l'audience, il a été demandé à la société CJ Com de justifier
-de son effectif salarié lors du licenciement de M. X..., qui se révèle inférieur à onze,
- du remplacement de M. X... après son licenciement, le conseil de M. X... étant autorisé à répondre sur ce dernier point.

La société CJ Com, par l'intermédiaire de son avocat, a transmis les éléments demandés à propos du remplacement de M. X... par fax, parvenu au greffe de la cour le 4 mai 2012, éléments sur lesquels le conseil de M. X... a répondu par courrier enregistré le 12 mai 2012.
Ensuite, l'avocat de la société CJ Com a transmis les 21 et 22 mai 2012 ainsi que 11 juin 2012 de nouvelles pièces et notes en réponse à la note de son confrère, auxquelles le conseil de M. X... a répondu les 5 et 15 juin 2012.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le licenciement

Le juge devant lequel un licenciement est contesté doit, en application de l'article L. 1235-1 du code du travail, apprécier le caractère réel et sérieux des griefs énoncés dans le courrier qui notifie cette mesure et qui fixe les limites du litige, mais aussi rechercher au-delà de ces motifs, si le salarié le requiert, la véritable cause du licenciement prononcé.

La lettre de licenciement adressée à M. Michel X..., le 13 août 2009, par la société CJ Com est libellée en ces termes :
" Vous avez déjà fait comme je vous l'ai expliqué au cours de notre entretien du 10 août 2009, l'objet de nombreuses remarques verbales et de rappels à l'ordre sur votre comportement méprisant et dédaigneux que vous avez eu avec l'ensemble de vos collègues, certains clients et fournisseurs et moi-même au cours le votre activité professionnelle.
Vous avez également fait l'objet d'un avertissement pour les mêmes motifs en date du 18 février 2008.
J'ai essayé de vous faire prendre conscience que sans changement de votre part, je serais obligé de mettre lm terme à nos relations contractuelles. Or malgré cela, vous avez continué à occuper vos fonctions sans amélioration et l'attitude que vous avez eu le 28 juillet 2009, plus les faits qui ont été portés à ma connaissance ce même jour ne peuvent plus être supportés et gênent fortement la bonne marche et la réputation de la Société.
Attitude et faits que je vous rappelle :
Conflit du 28 juillet 2009
A la suite d'un rendez vous avec la CC de commune du Pays Calaisiens, pour qui nous développons un site, le client nous a fait part de sa volonté de modifier l'animation du bandeau et son graphisme.
J'ai donc posé le problème auprès de l'équipe pour savoir comment faire pour accéder à son souhait. Très rapidement, vous êtes intervenu pour me dire que si on ne faisait pas ce qui était prévu, le client ne pourrait pas modifier lui-même ses photos. Je vous ai expliqué plusieurs fois avec beaucoup de patience que le client était averti et qu'il fallait respecter sa volonté. Face à mon insistance, votre agacement s'est vite fait sentir et vous m'avez répondu très sèchement de façon méprisante en insistant sur mon incompétence à gérer une relation client.
Voyant la tension montée, un graphiste a essayé d'intervenir pour savoir ce dont vous aviez besoin pour travailler et trouver des solutions. Vous êtes alors rentré dans une grosse colère et avez prononcé à mon encontre et à celle du graphiste des propos très détestables et dédaigneux dont le ton était du type « allez vous faire foutre ». Vous avez ensuite fait preuve d'un certain mutisme, démontrant manifestement votre refus de tout dialogue et confirmant votre opposition à trouver une solution à notre client.
Je vous ai signifié que votre attitude était une fois de plus inadmissible et qu'il était impossible de travailler un aspect créatif si de l'autre coté on avait pas un avis technique qui permettait de le réaliser. J'ai donc pris acte de votre refus de suivre mes consignes.
Client CODEL
Le CODEL est le comité de développement économique d'Eure et Loir, structure économique rattaché au conseil général d'Eure et Loir. C'est un établissement très influent dans le secteur économique et toutes nouvelles entreprises qui s'implantent en Eure et Loir passent par eux. La gestion de leurs sites et le budget que cela représente pour notre Société sont très importants.
Par un courrier recommandé avec accusé de réception du 27 juillet 2009, j'ai été informé par Monsieur A..., Directeur du CODEL, de sa volonté de mettre un terme à toute relation commerciale avec notre Société. Après renseignements pris et confirmés par Monsieur A... par courrier, j'ai appris que le motif exclusif qui l'avait amené à prendre cette décision était une nouvelle fois le mépris et l'arrogance dont vous avez fait preuve vis-à-vis de son collaborateur en charge du dossier « nouveau ciel ». Ce fait n'étant pas un fait isolé (problème Madame B...), il préfère rompre toute relation.

Les conséquences d'une telle décision sont catastrophiques pour la société et par votre attitude, vous mettez en péril son équilibre et son image de marque.
Ces faits, me prouvent votre manque d'intérêt et de conscience professionnelle et je ne peux pas me permettre, pour la sauvegarde de la Société, de vous maintenir dans vos fonctions.
Vos explications recueillies au cours de notre entretien du 10 août 2009 ne m'ont pas permis de modifier mon appréciation à ce sujet ; je vous informe que j'ai en conséquence décidé de vous licencier pour faute.
Compte tenu de la gravité de celle-ci, votre maintien dans l'entreprise s'avère impossible. Je vous notifie par la présente, votre licenciement immédiat, sans préavis ni indemnité de rupture... ".

M. X... soutient, en préambule, que son licenciement disciplinaire n'est qu'un licenciement pour motif économique déguisé.
Il s'appuie en cela sur les différentes modifications qu'a subies son contrat de travail, sur demande dans les deux cas, affirme-t'il, de la seule société CJ Com, dans un contexte économique obéré en ce qui la concerne, et alors, enfin, qu'il n'a pas été remplacé sur son poste.

L'article L. 1233-3 du code du travail indique que " constitue un licenciement pour motif économique, le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié, résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ".
Est également reconnu comme motif justificatif d'une telle mesure, la réorganisation décidée par l'employeur afin de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe auquel cette dernière appartient.

Les difficultés économiques que rencontrait la société CJ Com, au moment du licenciement de M. X..., sont indéniables au vu :
- d'une part, de ses comptes d'exploitation dont la clôture est fixée au 31 mai, son résultat net n'ayant cessé de décroître entre 2006 et 2009 pour s'établir
o en 2006, à 35 000 euros,
o en 2007, à 29 000 euros,
o en 2008, à 24 000 euros,
o en 2009, à 1 000 euros,
- d'autre part, de son propre courrier du 10 mars 2009, qui concernait l'ensemble de ses salariés, point qu'elle n'a pas démenti, duquel il résulte qu'elle ne rémunérera plus dorénavant les heures supplémentaires, de la 36ème à la 39ème heure, optant pour leur récupération " en fonction de l'activité de l'entreprise ".

La société CJ Com se défend de ce que la réduction du temps de travail de M. X... à 28 heures hebdomadaires au lieu de 39, M. X... étant employé sur une base mensuelle de 169 heures, avec diminution corollaire de sa rémunération, selon avenant du 29 juin 2009, donc à peine un peu plus de trois mois plus tard, soient dictées par ces mêmes difficultés économiques. Elle produit, à l'appui, un écrit dactylographié, signé par M. X..., ce qui n'est pas contesté par ce dernier, dont la teneur est la suivante :
" Monsieur C...,
Je soussigné Michel X..., demande par la présente lettre à M. C..., directeur de CJ. com, de pouvoir changer mes horaires de temps de travail qui sont actuellement de 35 heures hebdomadaire à 28 heures hebdomadaire à compter du 1er juillet 2009.
Cordialement,
X... Michel
...
72 000 Le Mans
Fait au Mans le 25 juin 2009 ".

Il est certain que l'employeur ne peut modifier, sans l'accord du salarié, la durée du travail telle que mentionnée à son contrat. Ainsi, s'il désire transformer des postes à temps plein en postes à temps partiel, l'employeur peut proposer à ses salariés, ou à certains d'entre eux, de réduire leur activité, ne pouvant cependant les y contraindre.
Dès lors, que M. X... ait formalisé son accord par écrit, quant à la diminution de son temps de travail, répond à cette obligation. Que cet écrit traduise la volonté de M. X... et non celle de son employeur dans cette réduction du temps de travail n'est, en revanche, pas démontré, en ce que si cette demande répondait au réel souhait de M. X..., il est incompréhensible que l'accord de la société CJ Com qui y figure soit antérieur à la date que porte cet écrit ; en effet, le courrier est du 25 juin 2009, alors que l'employeur a indiqué sur ce document, de façon manuscrite, " reçu le 24 juin pour accord " et signé. La thèse de M. X..., selon laquelle il n'a fait que répondre à une demande de son employeur motivée par des raisons économiques, est par voie de conséquence parfaitement plausible, d'autant que la société JC Com venait, peu de temps auparavant, d'indiquer qu'elle ne rémunérerait plus les heures contractuellement prévues de la 36ème à la 39ème heure et qu'elle était, depuis, en possession de ses comptes au titre de l'année 2009 qui connaissaient une chute significative et inquiétante, puisque son résultat net était passé, en un an, de 24 000 à 1 000 euros.

La société JC Com se défend, également, de ce que M. X..., à la suite de son licenciement, n'ait pas été remplacé sur son poste d'intégrateur, webmaster. Elle produit, pour en justifier, différentes pièces (contrats de travail, attestations, mail).
Si elle a certes embauché M. D..., par contrat de travail à durée indéterminée en date du 3 septembre 2009, à effet du même jour, elle ne prouve pas pour cela que M. D... remplaçait effectivement M. X..., mais plutôt, ainsi que ce dernier l'affirme, pièces à l'appui (extrait de la convention collective, contrat de travail, lettres et attestation), que M. D... remplaçait un autre salarié de l'entreprise, M. E..., qui avait donné sa démission par courrier du 2 juillet 2009, avec une fin de préavis au 27 août 2009, de son poste de développeur web suivi de projet.
En effet, M. D... a été recruté en tant que développeur web, à un poste identique donc à celui de M. E..., avec strictement les mêmes fonctions, soit " le développement et la programmation de base de données pour le web et le suivi de projet : définition des propositions commerciales partie technique ; de la réalisation du cahier des charges fonctionnelles et techniques ; assurer le suivi de certains de nos clients (assistance, formation) et de nos prestataires dans le domaine du web SS 21 et hébergeur " ; il a d'ailleurs bénéficié d'une formation par M. E..., qui a facturé la prestation à la société JC Com ce que celle-ci confirme, " au fonctionnement et à l'utilisation de l'outil de gestion de contenus " que celui-ci avait mis au point dans l'entreprise.
La définition que donne le contrat de travail de M. X... à ses fonctions d'intégrateur, webmaster, est différente en ce qu'elle consiste dans le " développement des pages HTML et (ou) flash nécessaire à la conception des sites internet ou cd-rom, dans l'intégration des contenus, la réalisation d'animations (flash...), le découpage et l'intégration de séquences vidéo ; assurer le référencement annuel des sites et le suivi de l'hébergement ".
Preuve encore de ce que M. D... remplaçait M. E... et non M. X..., est que M. D... a fait parvenir à M. C..., le 30 juillet 2009, son numéro de sécurité sociale, ayant d'ores et déjà signé une promesse d'embauche avec la société, à une date ignorée, mais forcément antérieure au 30 juillet. Or, et sauf à conclure que le licenciement de M. X... était déjà acquis avant même que la procédure ne soit engagée, ce que la société JC Com dément formellement, M. X... n'a été convoqué en entretien préalable en vue d'un licenciement que le 30 juillet 2009 justement, étant rappelé en outre que M. E... avait, quant à lui, donné sa démission le 1er juillet 2009, ce qui est alors compatible avec une procédure de recrutement, sur le même poste, menée au mois de juillet 2009.

La société JC Com ne peut, en tout cas, venir sérieusement dire que M. D..., n'ayant pas les compétences de M. E..., il a fallu finalement recourir pour assurer ses tâches à un apprenti, M. F..., du 14 décembre 2009 au 13 décembre 2010, payé au SMIC, qui était en IUT à Laval et préparait un diplôme de Conception et réalisation de services et produits multimédias ; l'on ne sait pas, non plus, le devenir de ce contrat, s'est-il poursuivi par la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée ou une autre personne a-t'elle été recrutée à l'issue de l'année d'apprentissage.

Dans ces conditions, il apparaît que la véritable cause du licenciement de M. X... par la société JC Com est une cause économique et non disciplinaire, devant les difficultés économiques sérieuses auxquelles elle était confrontée et, le poste qu'occupait M. X... ayant été, de fait, supprimé.

Il est permis d'autant plus de dire qu'il s'agit d'un licenciement pour motif économique déguisé que les griefs avancés dans la lettre de licenciement qu'a fait parvenir la société JC Com à M. X... ne sont ni réels, ni sérieux.

Il paraît utile d'indiquer que si ce document fait référence, en préambule, aux " nombreuses remarques verbales et de rappels à l'ordre sur votre comportement méprisant et dédaigneux que vous avez eu avec l'ensemble de vos collègues, certains clients et fournisseurs et moi-même au cours le votre activité professionnelle ", outre un avertissement " pour les mêmes motifs " le 18 février 2008, il s'agit là, non des griefs qui fondent le licenciement et qui requièrent l'examen du juge quant à leur caractère réel et sérieux, mais d'éléments qui, à supposer les griefs reprochés établis, permettent de justifier, d'autant plus peut-on dire, le fait que l'employeur ait estimé devoir prononcer un licenciement pour faute grave à l'encontre de son salarié.

En l'espèce, les griefs faits par la société JC Com à M. X... se résument à deux épisodes, à savoir son comportement au cours d'une réunion qui s'est tenue à l'entreprise le 28 juillet 2009 ainsi que la perte d'un client important pour l'entreprise, le CODEL, en lien encore avec ses attitudes.

a) le premier grief
Pour l'établir, la société JC Com verse deux attestations de salariés présents lors de la réunion du 28 juillet 2009, MM. Baptiste G..., infographiste, et Ludovic G..., graphiste cadre chef du studio.
Il est à noter que, tout comme les termes employés dans la lettre de licenciement, pour ce qui concerne le préalable à une éventuelle perte de contrôle de la part de M. X..., il n'est pas rapporté de propos précis qui caractériseraient le mépris manifesté par M. X... à l'encontre de M. C..., l'ironie ajoutent MM. G..., hormis que M. X... aurait posé plusieurs fois la question à M. C... quant à savoir s'il avait bien dit au client qu'avec la modification que celui-ci demandait, il ne pourrait plus ensuite procéder de lui-même à des modifications ; ce sont là des considérations subjectives, quant au mépris et à l'ironie qui auraient pu être témoignés, qui ne peuvent être considérés comme réels et sérieux puisque non vérifiables matériellement.
Ensuite, il est question de ce qui peut s'apparenter à une " explosion " de M. X..., hormis que la lettre de licenciement reste dans la subjectivité, parlant de " propos très détestables et dédaigneux dont le ton était du type « allez vous faire foutre » ", alors que MM. G... déclarent, tous deux, que M. X... aurait dit " allez vous faire foutre ". Une telle différence de retranscription d'une scène que le responsable de la société et ses deux salariés disent avoir vécu est inexplicable.

Enfin, la lettre de licenciement conclut à un refus de la part de M. X... d'exécuter l'ordre donné, alors qu'au contraire, MM. G... indiquent, l'un et l'autre, que M. X... s'est assis à son poste de travail, demandant " bon qu'est ce que je fais ? " ; une telle question ne peut s'interpréter comme une insubordination de sa part, d'autant que les personnes présentes, au moins l'un des graphistes, avait effectivement proposé son aide afin de résoudre le problème technique posé.
Devant tant de subjectivité, d'approximation, voire de contradiction entre les protagonistes de ce supposé conflit, ce premier grief ne peut être considéré comme établi, et ce d'autant moins que M. E..., également présent lors de cette réunion du 28 juillet 2009 a attesté, pour sa part, que s'il y avait pu avoir " altercation entre Mr X... et Mr C...... je n'ai entendu à aucun moment entendu Mr X... insulter une personne de l'agence ".
Il n'y a en tout cas pas plus de raison d'écarter les témoignages de MM. G... que celui de M. E..., au seul motif que les deux premiers ont toujours un lien de subordination avec la société JC Com et que le troisième a un prétendu conflit avec la société JC Com.
b) le second grief
Le fait qu'un motif sur lequel est fondé un licenciement ne soit pas énoncé au salarié lors de l'entretien préalable, ne fait pas obstacle à son examen par le juge dans l'appréciation de son caractère réel et sérieux ; tout au plus y a-t'il irrégularité de forme.
En revanche, comme on l'a précisé, les motifs énoncés dans la lettre de licenciement fixent les limites du litige et doivent être examinés par le juge quant à leur réalité et à leur sérieux.
La société JC Com vise " un courrier recommandé avec accusé de réception du 27 juillet 2009, par lequel elle a été informé e par Monsieur A..., Directeur du CODEL, de sa volonté de mettre un terme à toute relation commerciale avec notre Société ", poursuivant sur le fait que cette rupture de relations est liée aux comportements que M. X... aurait eus envers le personnel de cet organisme.
Or, les seuls courriers du CODEL à la société JC Com et à son responsable M. C..., sont :
- d'une part, une lettre du 22 juillet 2009, dont le contenu est le suivant : " Pour faire suite à plusieurs demandes non fructueuses faites par téléphone de la part de mes équipes pour récupérer les codes FTP de notre site internet, je me vois dans l'obligation de vous envoyer ce courrier officiel pour vous réclamer, dans les plus brefs délais, l'ensemble des codes FTP pour accéder aux serveurs et à l'intégralité des codes sources des sites internets suivants.... Dans l'attente de recevoir ces éléments sous 8 jours maximum, je vous prie d'agréer, monsieur, mes salutations distinguées ",
- d'autre part, une lettre du 11 août 2009, dont le contenu est le suivant : " Pour faire suite à notre courrier recommandé du 24 juillet dernier, par lequel je vous demandais les codes FTP et autres fichiers sources de l'ensemble des sites internets suivants... ; nous les avons enfin reçus et je tenais à vous en remercier. Cependant vous comprendrez que l'attitude de votre personnel et notamment de la personne en charge du dossier au sein de votre société, monsieur X..., vis-à-vis du personnel du Codel, nous contraint à vous retirer la maintenance et les évolutions techniques de ces sites. Une relation client fournisseur se bâtit sur le respect mutuel des collaborateurs et des équipes ce qui n'est plus le cas aujourd'hui. Je vous prie d'agréer, monsieur, mes salutations distinguées ".
La société JC Com n'a donc jamais été informée le 27 juillet 2009, comme elle le prétend, que la rupture des relations commerciales avec le CODEL était consommée.
La teneur du courrier du 11 août 2009 du CODEL, précité, ne fait visiblement pas état de ce supposé envoi du 27 juillet, de même que, comme l'indique la société JC Com dans la suite de la lettre de licenciement, que cette lettre du 11 août est l'explicitation, après avoir été interrogé en ce sens par M. C..., des raisons qui ont poussé le CODEL à cette rupture.


D'ailleurs, le courrier recommandé avec accusé de réception du 27 juillet 2009 dont s'agit n'est pas fourni aux débats par la société JC Com.
Pour ces seules raisons, ce second grief ne peut pas plus être considéré comme établi.

Le licenciement de M. X... par la société JC Com, licenciement pour motif économique déguisé et licenciement dont les griefs ne sont de toute façon pas caractérisés, ne repose donc pas sur une faute grave, tout comme il est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Le jugement de première instance sera confirmé du premier chef et infirmé du second.

Sur les conséquences du licenciement

Le licenciement de Michel X... n'étant pas plus fondé sur une faute grave que sur une cause réelle et sérieuse, celui-ci est en droit de prétendre aux indemnités dites de rupture, à savoir l'indemnité compensatrice de préavis et l'indemnité de licenciement, outre une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La convention collective nationale de la publicité comporte une grille de classification des qualifications professionnelles, de laquelle il résulte que les salariés du secteur sont classés en trois catégories : employés, techniciens-agents de maîtrise et cadres.
M. X..., intégrateur, webmaster, au niveau 2. 4, faisait partie de la deuxième catégorie des techniciens-agents de maîtrise.

L'article 49, consacré au licenciement de cette catégorie de personnel, spécifie que :
" Le licenciement est soumis aux règles de procédure prévues par la loi et la présente convention.
Toutefois, le bénéfice des dispositions prévues en la matière pour les entreprises de plus de 11 salariés, sera étendu à toutes les entreprises soumises à la présente convention, quel que soit leur effectif ".
Cet article prévoit également qu'en cas de licenciement individuel, " le collaborateur licencié bénéficiera :
a) D'un préavis de 2 mois ou, le cas échéant d'une indemnité correspondante
...
b) de l'indemnité de licenciement, telle qu'elle est prévue à la présente convention... ".

L'article 50 indique que :
" Il est alloué aux collaborateurs licenciés, ayant au minimum 2 ans d'ancienneté dans l'entreprise, une indemnité distincte du préavis et s'établissant comme suit :
- pour une période d'ancienneté jusqu'à 15 ans : 33 % de mois des derniers appointements perçus par l'intéressé, par année complète de présence,
...
L'indemnité ci-dessus ne peut en aucun cas se cumuler avec l'indemnité fixée par les dispositions légales en matière de licenciement ".

Le montant de l'indemnité compensatrice de préavis correspond aux salaires et avantages qu'aurait perçus le salarié s'il avait travaillé pendant cette période, soit sur la base du salaire tel qu'il résulte des dernières fiches de paie, en fonction de l'horaire contractuel du salarié.
Néanmoins, en cas de manquements de l'employeur à ses obligations, il s'agit du salaire et des avantages bruts auxquels aurait pu prétendre le salarié, et non de la rémunération effectivement perçue,

Tous les éléments de rémunération, fixes et variables, ayant le caractère de salaire doivent être retenus, ainsi les primes telles que d'ancienneté, les heures supplémentaires si elles se présentent comme un élément stable et constant de la rémunération sur lequel le salarié était en droit de compter ; l'indemnité est alors calculée par référence à la moyenne annuelle des salaires.

Au regard de ces principes, confrontés aux bulletins de salaire versés par M. X..., l'indemnité compensatrice de préavis qui lui est due s'élève à la somme de
5 422, 82 euros, outre 542, 28 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la société JC Com de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes.
La décision des premiers juges, qui ne lui a alloué que 3 951, 34 euros d'indemnité compensatrice de préavis ainsi que 395, 13 euros de congés payés afférents, devra être confirmée dans le principe de la condamnation, mais infirmée sur le quantum.
Les conditions de l'article 1154 du code civil étant remplies, il y a lieu de faire droit à la demande de capitalisation des intérêts.

M. X... a été embauché par la société JC Com le 1er juin 2001 et a été licencié le 13 août 2009.
Il comptait donc huit années de présence complète dans l'entreprise.

Au regard de ses derniers appointements, qui s'établissent à la somme de 2074, 24 euros, l'indemnité conventionnelle de licenciement qui est due à M. X... s'élève à la somme de 5 475, 99 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la société JC Com de sa convocation devant le dureau de conciliation du conseil de prud'hommes.

La décision de première instance qui ne lui a alloué que 4 198, 30 euros d'indemnité de licenciement devra être confirmée dans le principe de la condamnation, mais infirmée sur le quantum.
Les conditions de l'article 1154 du code civil étant remplies, il y a lieu de faire droit à la demande de capitalisation des intérêts.

Est applicable, et bien que l'effectif salarié de la société JC Com soit inférieur à onze, l'article L. 1235-3 du code du travail qui dispose :
" Si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise...
Si l'une ou l'autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l'employeur ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant de l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9 ".
C'est la rémunération brute dont bénéficiait le salarié pendant les six derniers mois précédant la rupture de son contrat de travail qui est à considérer comme base d'indemnité minimale. L'éventuel surcroît relève de l'appréciation souveraine des juges du fond.

M. X... allait sur ses 45 ans et son ancienneté au sein de la société JC Com était de huit ans, deux mois et treize jours, lors de son licenciement.
Il a justifié qu'ensuite, il avait été pris en charge par le Pôle emploi dans le cadre d'une allocation d'aide au retour à l'emploi, sans cependant verser de pièces quant à sa situation présente.

La cour trouve, au regard de son ancienneté, de sa capacité à retrouver un emploi qui peut être diminuée du fait de la maladie dont il est porteur ainsi qu'en atteste le certificat médical produit en date du 19 mars 2012, les éléments pour fixer à la somme de 28 000 euros l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui lui est due, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.
Les conditions de l'article 1154 du code civil n'étant pas remplies, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de capitalisation des intérêts.

Il devra, en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, être ordonné le remboursement au Pôle emploi des allocations de chômage que ces services ont été dans l'obligation de débourser pour M. X..., du licenciement à ce jour, dans la limite de six mois.

Sur les dommages et intérêts pour préjudice distinct

M. Michel X... sollicite une somme de 16 371, 60 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral.
Il invoque, afin de justifier du préjudice subi, tant des circonstances liées à l'exécution de son contrat de travail, ainsi l'avertissement infligé de même que la diminution de son horaire de travail, ou le fait que, de par les arguments fallacieux utilisés par la société JC Com pour le licencier, son image ait été atteinte.

Quant à l'avertissement dont s'agit, il est à noter que M. X..., même s'il l'a contesté par écrit, n'en a pas sollicité l'annulation comme il aurait pu le faire devant le conseil de prud'hommes tant à l'époque, qu'au moment où il a saisi la justice relativement à son licenciement (articles L. 1333-1 à L. 1333-3 du code du travail).
De même, il aurait pu refuser la diminution de l'horaire de travail qui lui était proposée, sans qu'un tel refus puisse forcément lui être imputé à faute.
Aussi, un salarié licencié dans des conditions vexatoires ou brutales peut, certes, prétendre à des dommages et intérêts en raison du préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi ; cependant, le préjudice dont fait état M. X... a d'ores et déjà été pris en compte, puisqu'il a été estimé que le licenciement dont il a été l'objet était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Dans ces conditions, il conviendra de débouter M. X... de sa demande de dommages et intérêts.

Sur la contrepartie financière de la clause de non-concurrence

Le contrat de travail de M. Michel X... comporte, en son article VII, une clause de non-concurrence rédigée comme suit :
" Compte tenu de la nature de ses fonctions, vous vous interdisez, en cas de cessation du présent contrat, qu'elle qu'en soit la cause :
- d'entrer au service d'une entreprise concurrente et en particulier des entreprises ayant le même objet social,
- de s'intéresser directement ou indirectement à toute fabrication et à tout commerce pouvant concurrencer la société.
Cette interdiction de concurrence est limitée à une période de UN AN commençant le jour de la cessation effective du contrat, et couvre le territoire de la Sarthe.
Toute violation de la présente clause de non-concurrence vous rendra automatiquement redevable d'une pénalité fixée dès à présent et forfaitairement à 1 000 Euros, pénalité due pour chaque infraction constatée, sans qu'il soit besoin d'une mise en demeure d'avoir à cesser l'activité concurrentielle.

Le paiement de cette indemnité ne porte pas atteinte aux droits que la société se réserve expressément de vous poursuivre en remboursement du préjudice judiciaire et moral effectivement subi et de faire ordonner sous astreinte la cessation de l'activité concurrentielle.
En contrepartie de l'obligation de non concurrence prévue ci-dessus, vous percevrez après la cessation effective de votre contrat et pendant toute la durée de cette interdiction une indemnité spéciale forfaitaire égale à 10 % de la moyenne mensuelle des salaires perçus au cours de vos trois derniers mois de présence dans la Société.
Toute violation de l'interdiction de concurrence, en libérant la société CJ COM du versement de cette contrepartie, vous rendra redevable envers elle du remboursement de ce que vous aurez pu percevoir à ce titre.
La société CJ COM pourra cependant vous libérer de l'interdiction de concurrence et par là même se dégager du paiement de l'indemnité prévue en contrepartie, soit à tout moment au cours de l'exécution du contrat, soit à l'occasion de sa cessation, sous réserve dans ce dernier cas de notifier sa décision par lettre recommandée au plus tard le jour de la cessation effective des fonctions ".

Il ne fait pas débat que la société JC Com, lorsqu'elle a licencié M. X... le 13 août 2009, n'a pas libéré celui-ci de l'obligation de non-concurrence impartie.
La société JC Com n'établit, ni même n'allègue, que M. X... ait, durant l'année ayant suivi la cessation de son contrat de travail, violé son obligation de non-concurrence.
Dès lors, elle est bien tenue à paiement de la contrepartie prévue, qui a été fixée par les premiers juges à la somme de 1 580, 53 euros.
Si leur décision doit être confirmée en son principe, elle sera par contre infirmée en son quantum, et il sera alloué à M. X... la somme qu'il réclame de 2 738, 64 euros, qui n'est pas même discutée par la société JC Com, d'autant qu'elle a été exactement calculée.
Cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la réception par la société JC Com de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes.
Les conditions de l'article 1154 du code civil étant remplies, il y a lieu de faire droit à la demande de capitalisation des intérêts.

Sur le rappel d'heures supplémentaires

M. Michel X... demande que lui soit versée la somme de 569, 70 euros, correspondant aux heures supplémentaires qu'il a accomplies d'avril à juin 2009.
Le courrier du 10 mars 2009 émanant de la société JC Com mentionnait en effet, que pour l'avenir, à compter du 16 mars 2009, les heures supplémentaires, de la 36ème à la 39ème heure, qui étaient jusqu'alors rémunérées, la durée contractuelle du temps de travail de M. X... étant de 169 heures mensuelles, ne le seraient plus, mais seraient versées sur un " compte temps " et récupérées en fonction de l'activité de l'entreprise.

Il est possible, par application de l'article L. 3121-24 du code du travail, de prévoir le remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires et des majorations s'y rapportant par un repos compensateur équivalent.
Cela implique que le salarié concerné soit tenu informé, conformément à l'article D. 3171-11 du code du travail, du nombre d'heures de repos compensateur équivalent, et aussi d'ailleurs de la contrepartie obligatoire en repos, portés à son crédit, par un document annexé à son bulletin de salaire. Et, dès que ce nombre atteint 7 heures, la notification de l'ouverture du droit à repos doit être indiquée dans le même document, outre l'obligation de le prendre dans un délai de deux mois après son ouverture.

M. X... déclare, qu'en sus de ne plus être payé entre la 36ème et la 39ème heure, le " compte temps " spécifié n'a pas non plus été ouvert.
La société JC Com n'a aucun élément à opposer, alors qu'il lui appartenait de veiller à la mise en place effective de la décision par elle prise.

En conséquence, M. X... est effectivement fondé à obtenir les 569, 70 euros qu'il réclame, dont le décompte est exact et d'ailleurs non contesté par la société JC Com.
Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 19 avril 2012, date à laquelle elle a été demandée pour la première fois.
Les conditions de l'article 1154 du code civil n'étant pas remplies, il n'y a pas lieu d'ordonner la capitalisation des intérêts.

Sur l'exécution provisoire

Le présent arrêt n'étant pas susceptible d'un recours suspensif, la demande d'exécution provisoire est dépourvue d'intérêt.

Sur les frais et dépens

Les dispositions de première instance relatives aux frais et dépens seront confirmées.

La société JC Com, succombant en son appel, sera condamnée à verser à M. Michel X... la somme de 2 500 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel, elle-même étant déboutée de sa demande de ce chef.
Elle sera également condamnée à supporter les entiers dépens de l'instance d'appel.


PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le licenciement de M. Michel X... n'était pas fondé sur une faute grave, en ce qu'il a reconnu à M. Michel X... droit à l'indemnité compensatrice de préavis et aux congés payés afférents ainsi qu'à l'indemnité de licenciement, ainsi qu'à la contrepartie de la clause de non-concurrence, et dans ses dispositions relatives aux frais et dépens,

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que le licenciement de M. Michel X... par la société JC Com est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la société JC Com à verser à M. Michel X... les sommes suivantes :
-5 422, 82 euros d'indemnité compensatrice de préavis, outre 542, 28 euros de congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la réception par la société JC Com de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et capitalisation des intérêts,
-5 475, 99 euros d'indemnité conventionnelle de licenciement, avec intérêts au taux légal à compter de la réception par la société JC Com de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et capitalisation des intérêts,
-28 000 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, la demande de capitalisation des intérêts étant rejetée,
-2 738, 64 euros de contrepartie de la clause de non-concurrence, avec intérêts au taux légal à compter de la réception par la société JC Com de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et capitalisation des intérêts,

-569, 70 euros de rappel d'heures supplémentaires, avec intérêts au taux légal à compter du 19 avril 2012, la demande de capitalisation des intérêts étant rejetée,
-2 500 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel,

Ordonne à la société JC Com de rembourser au Pôle emploi les allocations de chômage que ces services ont été dans l'obligation de débourser pour M. Michel X..., du licenciement à ce jour, dans la limite de six mois,

Déboute M. Michel X... de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral,

Déclare sans objet la demande d'exécution provisoire,

Déboute la société JC Com de sa demande au titre de ses frais irrépétibles d'appel,

Condamne la société JC Com aux entiers dépens de l'instance d'appel.


 

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