DROIT INFORMATIQUE

Jurisprudence

Cass. com., 17 juillet 2001
pourvoi 98-15.548

droit informatique

Les grands arrêts de la jurisprudence en droit informatique : arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 17 juillet 2001 (pourvoi 98-15.548)

Cour de cassation, chambre commerciale
17 juillet 2001, pourvoi 98-15.548

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société CEGID Informatique, société anonyme, dont le siège est ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 20 février 1998 par la cour d'appel de Paris (5e chambre civile, section C), au profit de la société ABS Le Store français, société anonyme, dont le siège est ...,

défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 19 juin 2001, où étaient présents : M. Dumas, président, Mme Mouillard, conseiller référendaire rapporteur, M. Métivet, conseiller, M. Jobard, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Mouillard, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thomas-Raquin et Benabent, avocat de la société CEGID Informatique, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société ABS Le Store français, les conclusions de M. Jobard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué (Paris, 20 février 1998) que la société CEGID Informatique (CEGID) a réclamé à la société ABS Le Store français (ABS) le paiement du matériel informatique qu'elle lui avait livré ; que cette dernière a résisté, en faisant valoir qu'elle avait commandé un ensemble "clé en mains" incluant un logiciel spécifique que la société CEGID n'a pas été en mesure de lui fournir ;

Attendu que la société CEGID fait grief à l'arrêt d'avoir prononcé la résolution du contrat de fourniture et d'avoir en conséquence rejeté sa demande en paiement alors, selon le moyen :

1 ) que les premiers juges avaient retenu et la SA CEGID faisait valoir dans ses conclusions que, si même les prestations avaient été initialement conçues comme indivisibles, la SA ABS avait non seulement conservé les matériels livrés en 1990, mais encore les avait exploités régulièrement jusqu'en 1994 et avait en outre accepté en décembre 1990 une formation de son personnel qui avait été effectivement réalisée par CEGID, ce dont il résultait qu'elle avait a posteriori consenti à une division des prestations contractuelles impliquant son obligation de payer celles qu'elle avait reçues et exploitées ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, qui était juridiquement pertinent dés lors qu'il est toujours loisible aux parties à un contrat d'en modifier le contenu au cours de son exécution par un accord exprès ou tacite de leurs volontés, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

2 ) qu'à supposer même que la résolution du contrat en son entier pût être prononcée pour manquement de la SA CEGID à ses obligations, la cour d'appel ne pouvait prononcer cette résolution aux torts exclusifs de la SA CEGID en refusant de rechercher si, comme le soutenait cette dernière sur le fondement du rapport d'expertise, la SA ABS n'avait pas également, de son côté, manqué à ses obligations en s'abstenant de régler selon les prévisions contractuelles les travaux et prestations reçus et acceptés au titre de la première phase d'exécution du contrat, afin d'en déduire une résolution aux torts partagés des parties ;

qu'elle a ainsi violé l'article 1184 du Code civil ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que, si l'implantation matérielle du système a été conçue en trois phases successives, l'objet même du contrat était resté unique, la mise en place du matériel, des progiciels et du logiciel spécifique à élaborer étant voulue par les parties comme un tout indissociable destiné à satisfaire des besoins définis par la société ABS, connus et acceptés par la société CEGID, professionnelle avertie qui s'est engagée à les satisfaire, l'arrêt retient que la société CEGID n'a pas été en mesure de fournir le logiciel de gestion commerciale et industrielle annoncé, ce qui l'a plongée dans une impasse technique qu'elle n'a constatée que tardivement, et qu'elle ne peut valablement soutenir que seul le défaut de paiement par la société ABS des matériels livrés a justifié l'arrêt des prestations puisque, dès la réception des matériels, cette dernière a contesté la livraison comme prématurée, les travaux d'élaboration des logiciels spécifiques n'étant pas entrepris, qu'elle ne peut davantage se prévaloir des discussions entretenues par la suite pour soutenir que la société ABS avait accepté une division de ses obligations puisque, au contraire, celle-ci l'avait mise en demeure, dès le 3 décembre 1990, de reprendre les matériels qui, seuls, ne lui étaient d'aucune utilité, pas plus que de la tentative de relance de la mise en place du système complet intervenue ultérieurement, qui est demeurée infructueuse ; qu'en l'état de ces constatations et énonciations déduites de son appréciation souveraine des faits de la cause, la cour d'appel, qui a répondu aux conclusions prétendument omises, a pu prononcer la résolution du contrat aux torts exclusifs de la société CEGID ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société CEGID Informatique aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société CEGID à payer à la société ABS une somme de 15 000 francs ou 2 286,74 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept juillet deux mille un.


 

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